Le calme ouragan 1/2
- Par docjunior
- Le 02/10/2016
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Et on est reparti sur un des plus beaux stage qu'il m'a été donné de faire, en tout cas j'en garde un souvenir mémorable et cette journée que j'ai coupée en deux tellement elle est chargée y a bien contribué !
Comme je suis gentil :-) , c'est cadeau c'est pour vous, les liens des précédents billets --> Jour 1 1/2 ; Jour 1 2/2 ; Jour 2 ; Jour 3 1/2 ; Jour 3 2/2 ; Jour 4 ; Jour (5) et 6 ; Jour 7 <--
Jour 8 : Le calme ouragan (1/2)
Autant commencer par vous le dire tout de suite, si y’a un jour où ça n’a pas arrêté, c’est bien aujourd’hui. J’ai couru à droite, à gauche, je me suis fait engueulé par les patients, j’ai dû en surveiller d’autres, il y a eu des hurlements terribles. Enfin bref, la totale quoi ! Alors pourquoi je parle d’un calme ouragan ? Tout simplement parce qu’en arrivant rien ne me laissait deviner la suite… Pourtant dès le départ de chez moi, j’aurai pu (du ?) m’en douter…
12H30 : C’est l’heure de manger, il faut que je sois parti à 13H15 pour prendre le tram qui me conduira jusqu’à la gare. Cependant, le repas ne sera prêt que dans 20 minutes et je me prépare déjà à manger des vieux restes (miam, j’adore ça…). Mais comme il s’agissait d’un petit confit de canard, accompagné de frites et d’un craquant au chocolat en dessert, je prends le risque et j’attends. J’en vois déjà qui salive devant leur écran. Mais finissez au moins l’article avant de partir manger hein !
13H20 : ça y est je suis prêt et je suis déjà en retard. Enfin bon, je ne le regrette pas, mais alors pas du tout. C’était juste troooop bon !!! Ce que je ne savais c’est qu’effectivement, j’allais avoir quelques regrets juste après. Du coup je pars en catastroupf prendre mon tram.
13H28 : J’arrive à la gare à peu près à l’heure que j’avais prévu. J’entends à la radio une jolie reprise de radioactive d’Imagine dragon (j’adore) et me dirige d’un pas tranquille vers le panneau d’affichage pour voir à quel quai se trouve le train. Et la CATASTROPHE ! Misère, mais il est où ce ****** de train ?!!! (Note de la modération de doc junior à doc junior : ce terme a été supprimé en raison de sa trop grosse vulgarité, 1er avertissementJ).
Le prochain est à 14H15 alors qu’il était censé être là à 13H39 ! Je suis juste trop dans la ***** (note de la modération de Doc Junior à Doc Junior : 2ème et dernier avertissement. Warning !) là surtout que je dois y être pour 14H. Heureusement, il y a un bus à l’hôtel de ville mais celui-ci n’est que dans 7 minutes !
13H34 : Je peux vous jurer que je n’ai jamais couru aussi vite de ma vie. Et quand j’aperçois à l’arrêt au loin et que je vois mon bus arriver, j’ai crus que me cœur allait s’arrêter de battre (c’est pas très très agréable, je ne vous le recommande pas). Enfin, si j’avais fait un arrêt cardiaque, je me dirigeais de toute façon au bon endroit (belle ironie hein ?).
Alors du coup, il a fallu sortir les grands moyens pour les 100 derniers mètres. D’ailleurs je crois que même Usain Bolt n’aurait pas pu me rattraper. Ouf, j’ai finalement eu mon bus (allelouya !).
Et puis vous commencez à me connaître un peu je pense non ? J’adoore stresser, si si c’est un de mes passes temps. Alors autant vous dire que j’ai vraiment aimé cette petite dose d’adrénaline gratuite ! (ironie).
14H05 : Quand j’arrive, je ne vois aucun patient à l’accueil. « Super Ça va être une aprèm tranquille » je me dis. Et bien non ! Pas du tout ! La première chose que je vois dans le couloir des urgences c’est une infirmière (celle qui m’encadre assez souvent) aux prises avec un patient (monsieur A) qui veut absolument s’en aller. La galère…
14H15 : A peine le temps de déposer mes affaires au casier et de revenir qu’une petite mamie B qui avait chuté et qui a une minerve décide de parfumer l’hôpital. Vous connaissez le nouveau parfum de Channel ? Fragrance merdique n°10 et son délicat parfum de merde ? Cette suave senteur qui vous embaume les narines et pénètre jusqu’au plus profond de votre appareil pulmonaire jusqu’à aller caresser vos alvéoles ? Hé bien je ne vous le conseille pas ce parfum !
Vous m’avez compris, elle a déféqué sur son brancard. Vu qu’on met un plan dur sous les patients traumatisé, ce dernier est complétement emmerdé (et moi aussi vu que je vais participer au nettoyage…). Encore une fois je précise que je n’en veux pas du tout à la mamie, que je trouve ça tout à fait normal et humain de ne pas la laisser telle quelle quelque soit la situation, qu’elle en soit consciente ou non. Juste que c’est pas forcement ce qu’il y a de plus drôle. J’ai pu lire sur certain blog que parfois (rarement je suppose) on pouvait les laisser tels quels (en gériatrie par exemple ou en maladie psy) car on avait la flemme de se coller au nettoyage. Mais que le patient s’en rende compte ou non, il y a un respect de sa dignité qui reste et restera toujours essentiel !
14H40 : Monsieur A est en colère, il en a vraiment assez ! Ça crie à nouveau. Rien que pour vous (comme je vous adore trop), voici un petit extrait live du dialogue (j’ai tout noté intérieurement) :
- « Laissez-moi partir !!! J’en ai assez d’être là depuis 4H du matin. Vous allez me faire attendre encore combien de temps ? Des heures et des heures ! Je connais le fonctionnement pourris des hôpitaux moi ! » Hurle Mr A.
- « Monsieur écoutez, vous êtes alcoolisé et nous devons en plus vous garder sous surveillance ici. Là maintenant vous allez bien mais il se peut que dans 5H vous fassiez de nouveau malaise et là vous irez moins bien ». Répond l’infirmière très calme (je suis impressionné par sa maîtrise de la situation en passant)
- « Je dois partir d’ici, ya des gens qui m’attendent, une machine à laver, des animaux. JE VEUX ME CASSER D’ICI !!!
- Ecoutez monsieur A, je ne veux pas me battre avec vous ! C’est le médecin qui va décider. Maintenant je vous explique : si vous partez sans autorisation, on sera contraint de vous déclarer en fugue et d’appeler la police. C’est ce que vous voulez ? Le médecin va venir vous voir tout à l’heure
- Mais il ne m’a pas vu depuis ce matin !!!
- Ça c’est pas possible monsieur on vous a forcément vu
Je vous épargne la suite de ce dialogue de sourd et vous laisse imaginer combien ça doit être pénible pour l’infirmière de faire face à ce genre de comportement agressif. Des fois quand même il y a des patients qui n’en font qu’à leur tête (au détriment de leur santé d’ailleurs) et qui ne veulent rien mais vraiment rien entendre !
Finalement je vais lui proposer un petit café histoire de le calmer. Comme d’habitude, je demande la permission avant de faire quoi que ce soit et j’ai le droit à un petit « oh comme il est Meugnion, oui tu peux bien sûr ». En fait c’est pas que je suis juste mignon, c’est aussi et surtout qu’il me casse les vraiment les pieds et j’aimerai bien pour notre tranquillité à tous qu’il se calme un peu monsieur A ! Alors je lui apporte gentiment son café en souriant de mon beau sourire d’un blanc éclatant de toutes mes dents et le plus aimablement possible. Et… ça marche ! Comme quoi, un petit café et un sourire, ça peut faire des miracles ! Bon on va se calmer avant de prendre la grosse tête !
14H50 : Et c’est reparti ! Monsieur A vous dites ? Non non, il est sage comme une image (d’un « pitit » agneau broutant dans le pré, je ne sais pas pourquoi mais j’avais envie de le dire). Mais dans un autre box, il y a 2 patients qui se battent en duel. Je me tiens à l’écart, j’ai aucune raison d’aller risquer ma vie, je ne suis pas payé pour ça ! J’exagère ? Oui peut être un peu, un tout petit peu mais croyez moi que ce n’est jamais facile de gérer des situations dans ce genre…
15H00 : Mamie B décide que notre journée est beaucoup trop calme. C’est vrai j’ai l’air de m’ennuyer depuis tout à l’heure ! Sérieusement ! Alors, elle décide de se lever (alors qu’elle ne tiens pas debout) et de retirer sa couche en même temps ! Génial ! Et puis bien sûr, mon infirmière est occupée je ne sais où et mon aide-soignante de la journée (c’est elle qui m’a appelée en 1er « mon ptit chat ») est parti faire du café. Bref, je me retrouve tout seul à devoir gérer la situation. Et bien on va s’amuser.
Je lui retire et jette sa couche et j’essaye en même temps de lui en remettre une autre tout en lui demandant de se rallonger et en lui expliquant qu’elle ne doit pas bouger. Je vous l’ai déjà dit je suis multitâche !
Bilan de l’opération : succès mitigé, je parviens au moins à faire en sorte qu’elle ne s’écroule pas sur le sol, c’est déjà ça. Sauf que maintenant, elle veut aussi retirer sa minerve. Pffff. Et elle aussi, elle a beau avoir un certain âge, elle est têtue. Bon finalement j’arriverai avec l’aide de l’infirmière à la rallonger et lui changer la couche. Je vous dis pas comment j’étais soulagé quand je l’ai vu passer dans le couloir ! Sauf que mamie B n’avait pas fini de nous causer des soucis. Et pas qu’elle d’ailleurs…
15H15 : ça n’arrête pas, du monde et encore du monde ! J’installe un monsieur dans un box. Il va très bien sauf qu’il a bu. Il a bu parce qu’il est malheureux. Il est malheureux parce qu’il a un dossier de surendettement de plus de 50 000 euros (je vous ai déjà dit j’essaye de rester vague). Ces 50 000 euros de surendettement, il les a contractés avec sa femme pour un appartement. Mais sa femme, elle l’a quitté (avec l’appartement), en lui laissant la dette. Dette qui à présent le mine. La vie est dure.
Et toutes les semaines, il a une petite visite de Mr l’huissier pour prélever à la source de quoi rembourser. Tout est légal. Tout comme la retenue sur son salaire de routier.
Mais il m’explique qu’il aime son travail, qu’il ne conduit jamais bourré ou même alcoolisé… Il vient ici parce que sa famille est inquiète pour lui de le voir sombrer peu à peu. Mais il veut s’en sortir seul, il n’a besoin de personne.
Il me touche ce monsieur C. Je lui dis que c’est déjà très courageux de venir et qu’il n’y a aucune honte à avoir. Nous les soignants (hé hé je m’inclue déjà dedans), on n’est pas là pour juger mais pour aider et soigner. Puis je lui raconte mes moments de déprimes en PACES en lui disant que j’avais regretté de ne pas avoir demandé de l’aide plus tôt et que ce n’est pas honteux. Des fois on ne peut pas rester tout seul face à ses problèmes.
Edit (j’ai laissé tous les billets du stage infirmier tel quels ou presque. Je rajoute ici mon point de vue à la relecture de l’article) : Etait-ce mon rôle cependant ? Devais-je m’ouvrir (un peu) ainsi à lui ? Etait-ce (in)approprié ? Je ne sais pas mais c’est ainsi que j’ai réagi et j’espère l’avoir aidé, ne serait-ce qu’un peu en écoutant ses malheurs, montrant que je les comprenais. Ce que n’ont pas toujours le temps malheureusement de faire les infirmières ou les médecins. Mais étais-je trop proche à ce moment du patient ? Pas professionnel ? Je ne sais pas. Mais je sais que ce monsieur souffrait et que je pouvais l’aider. Un peu.
Bon je sais pas trop si ça se fait de parler de soi aux patient surtout que comme j’en ai parlé dans le billet « la bonne distance », on ne doit pas non plus se placer au même niveau. Mais je n’ai pas pu m’en empêcher. Je suis encore assez sensible à ce genre d’histoire pour l’instant mais il faudra vite que je m’insensibilise un minimum ou je risquerai d’entrer en dépression. Bien sûr quand je dis ça, il ne s’agira pas d’être tout à fait imperméable non plus. Juste à la bonne distance.
Edit : je ne sais pas si le terme s’insensibliser est le bon. Je dirai plutôt être capable de faire la part des choses, d’être touché par les patients sans être blessé. Cette situation en l’a vue en cours de communication (à peu près). C’est schématisable par quelqu’un qui tombe dans un trou. On peut soit fuir face au problème, rester à distance et tenter plus ou moins mal de l’aider, s’approcher pour porter secours au maximum ou bien sauter à pieds joints dans le fossé au risque de se retrouver soi même piégé et se tordre la cheville. C’est la dernière situation qui est à éviter.
Je lui fais son HGT (hémo gluco test pour ceux que ça intéresse) vulgairement appelé dextro. C’est pour mesurer le taux de sucre dans le sang. On pique ni sur le pouce ni sur l’index (les doigts de la pince » ni à l’extrémité des doigts. Puis on prélève une goutte de sang pour la mettre sur une languette connectée à un appareil.
Normalement on met des gants pour ça mais je me rends compte trop tard que j’ai oublié… Euh, j’espère qu’aucune infirmière ne va me voir ou ma note de stage va chuter… Non je déconne, à aucun moment du stage, j’ai pensé à mon rapport de stage et mon évaluation, je vivais à fond le moment puis comme j’étais plein de bonne volonté, je ne me faisais pas de souci pour le décrocher. Parce que quand même, ce stage est obligatoire et validant. En gros si tu ne l’as pas, il faudra le refaire et le réussir ou on ne passe pas en 3ème année (mais enfin tout le monde le valide faut vraiment avoir été une quiche (Lorraine) pour ne pas le valider)
Finalement, il pourra partir 5h plus tard après que je l’ai faits souffler dans le ballon et qu’il n’était « plus » qu’à 1g.L dans le sang. Ce qui reste non négligeable quand même soit dit en passant…
15H30 : Notre petite mamie B a fini sa sieste et je la vois se relever (encore une fois oui, c’est pénible) et essayer d’enlever sa minerve pour la Nème fois. J’en ai ras les pâquerettes ! Elle crie, elle résiste, elle dit qu’elle ne veut pas jouer avec, elle essaye de se mettre debout alors qu’elle ne tiens pas sur ses jambes. Alors on lui apporte une chaise, on l’assoit et l’infirmière attache un drap pour éviter qu’elle ne se relève. Astucieux n’empêche, j’y aurais pas pensé…
Etonnement, quand le médecin X passe dans le couloir, un imposant monsieur avec une barbe qui rajoute encore plus d’allure. Elle se calme aussitôt devant le « chef » comme elle dit. Mais c’est pour repartir de plus belle après son passage. Comme un volcan en éruption sur qui on mettrait un couvercle le temps que le carnaval passe puis qui crache à nouveau juste après (où je vais chercher ces comparaisons ? J’en sais fichtrement rien les amis).
Et quand quelqu’un aura le malheur de contrarier le volcan, la colère divine s’abattra sur lui sous la forme d’un cri strident à vous glacer le sang ! On dirait une sorte de prophétie d’un livre d’aventure bas de gamme non ? Comment ce serait moi l’auteur de ces lignes ? Ah oui c’est vrai… Désolé.
15H40 : Monsieur A signe sa décharge après moult discussions passionnées et s’en va. Un problème en moins remarque mais s’il lui arrivait quelque chose (ce que je ne souhaite pas), l’hôpital ne serait pas responsable…
16H15 : 1ère perf réussie (avec l’aide de l’infirmière mais quand même) ! Youhou ! Je saute de joie dans le couloir et entame des petits pas de dance. Et ce qui devait arriver arriva. Une aide-soignante que je n’avais pas vue m’a aperçu depuis l’autre bout du couloir et non comprenant pas ma joie subite me demande de me calmer. Heureusement pas de patient en vue. Imaginez la scène quoi ! Et puis vous, imaginez que vous êtes aux urgences et là brusquement vous voyez un jeune de 19 ans en blouse surexcité sautillant dans le couloir ! Enfin bon, en même temps si j’avais vu des patients (ou même n’importe qui) dans le couloir, j’aurai reporté ma « danse de la victoire « pour plus tard. Sauf que voilà, elle est arrivée en traître dans mon dos. Enfin bref. Shame shame shame.
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